• Les petits réactionnaires : dérive des musiques urbaines (2eme partie)

     

    Brûlez les batty boys

     

    L'autre versant de ce "virilisme" exacerbé est la haine des personnes LGBT , ou batty boys , comme on les surnomme péjorativement là-bas ; haine qui culmine parfois en de véritables appels aux meurtres : la mouvance dancehall , très populaire en Jamaïque, aux Antilles Françaises et dans la communauté afro-antillaise parisienne, s'est particulièrement illustrée dans ce domaine : on se souvient de Sizzla invitant le public à assassiner les homosexuels ( " Bute les pédés, mon gros flingue va tirer... Pan ! Pan ! Les pédés doivent être mis à mort..." ) ou des délires haineux de Capleton ( " Brûle un pédé / Saigne un pédé" )

    Ce dernier, membre de la secte fondamentaliste Bobo Ashanti , est d'ailleurs devenu un personnage influent en Jamaïque : à telle enseigne qu'il se fait maintenant, dans un accès de sotte mégalomanie, surnommer " The Prophet" : tout un programme.

    On pourrait penser que ce ne sont que des mots, que c'est certes idiot et discriminatoire , mais sans grande importance ; on se tromperait. Les effets nocifs de cette propagande homophobe se font en effet sentir dans la réalité jamaïcaine : c'est ainsi qu'un jeune gay à été assassiné par d'autres jeunes, qui sortaient justement d'un concert de dancehall ; c'est ainsi que des lesbiennes sont de plus en plus victimes de viols destinés à " les remettre dans le droit chemin " ; c'est ainsi qu'un garçon du nom de Nokia Cowan, de Kingston ,se noya en se voulant échapper à un lynchage .

    En 2004 , Brian Williamson , militant et fondateur de J- Flag , l'une des rares associations LGBT de Jamaïque, était assassiné à son domicile. L'année suivante, ce fut au tour du militant anti-sida Steve Harvey de tomber sous les balles des assassins.

    Voilà le lamentable bilan du mouvement dancehall , mouvement qui s'exporte aux Antilles Françaises , ou les provocations minables d'Admiral T ou de Krys, qui copient servilement leurs modèles jamaïcains , font fureur auprès des imbéciles.

     

    Courageux mais pas téméraires

    Pour justifier leur homophobie et leur haine des femmes , les "artistes" de ce mouvement , évoquent souvent leur "courage" : ils osent en effet dire ce qui n'est pas "politiquement correct" .

    On pourrait gloser sur ce "courage" , très particulier qui consiste à reprendre des opinions hélas partagées par de trop nombreuses personnes, ainsi que sur cet anticonformisme qui consiste à être d'accord avec la majorité (ce qui ne manque pas de sel, convenez-en).

    Mais on peut aussi s'étonner de ne voir cette bravoure à l'oeuvre que quand il s'agit de ces deux thèmes. Sur des sujets politiques ou sociaux autrement plus graves, le silence de nos héros indomptables est assourdissant.

    On attend toujours une chanson d'Admiral T sur le scandale du chlordécone, par exemple . Et n'oublions pas que lors du conflit qui secoua la Guadeloupe , pas un de ces révolutionnaires d'opérette n'ouvrit la bouche pour soutenir les manifestants.

    Rêvons un peu... Imaginons un monde où les chanteurs de dancehall dénonceraient de vrais abus, comme  les pratiques du personnel politique antillais par exemple... Mais  trêve de songes stériles. Une telle charge ne viendra jamais.

    Faut-il mordre une main, qui, demain, peut apporter la pâtée sous la forme de juteuses subventions ?

    Non, mieux vaut se coucher, enfiler sa laisse , et réserver sa "bravoure" pour des cibles moins en vue.

    Ainsi raisonne le chanteur de dancehall, du fond de sa niche.

     


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